• Alors voilà, c'est fait, comme l'indiquaient tous les sondages depuis deux mois et nonobstant le fait que tout le monde a voulu se faire des films, Barack Obama est bel et bien président des Etats-Unis.

    Passons rapidement sur l'irréalité de <?xml:namespace prefix = st1 ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:smarttags" /><st1:PersonName ProductID="la chose. Non" w:st="on">la chose. Non</st1:PersonName>, Barack Obama n'est pas noir, mais métis, et de surcroît passablement WASP. Loin du personnage de Robin des Bois que certains n'hésitent pas à lui dessiner. Obama n'est pas non plus de gauche, au sens où on l'entend en Europe. Obama n'est pas le président du Monde, mais celui des USA, et des deux candidats, si c'est certainement celui qui présente le plus de chance de mettre fin à des années d'unilatéralisme américain dans le Monde, c'est aussi le plus isolationniste, le plus américano-centré.

    De toute manière difficile de savoir ce que fera Barack Obama. Passés les discours de campagne à destination des électeurs américains (discours conservateurs dans les états conservateurs, progressistes dans les états progressistes, etc.), le plan d'ensemble de sa politique est pour le moment très largement une inconnue.

    L'élection du sénateur de l'Illinois est une bonne chose sur de nombreux points : Barack Obama montre que l'Amérique a encore réussi à donner à l'un de ses fils l'opportunité de s'élever par son talent et sa force de caractère, ce dont il ne manque certainement pas. Son héritage familial en fait un trait d'union idéal entre communautés blanches et noires, un ciment symbolique fort de la nation, au moment où des relents de racisme (anti-asiatique il est vrai pour l'essentiel) pointent le bout de leur nez dans certaines zones de l'Amérique. Son image de marque à l'étranger augure bien de la restauration d'un réel Soft Power Américain dans les relations internationales. L'état de grâce a commencé, et Obama aura certainement une influence sur la scène internationale, en tant que force de proposition, bien supérieure à celle de son prédécesseur. Il est aussi, et surtout, un symbole de changement et d'espoir bien légitime après un second mandat de Georges Bush perçu quasi-unanimement comme désastreux.

    Pourtant tout n'est pas rose, loin de là. L'élection d'un président métis mais perçu comme noir dans les medias et l'opinion publique risque de générer des attentes folles de la part des communautés, afro-américaines en particulier, avec des revendications sociales et politiques venant soudain avec force sur le devant de la scène, notamment d'un électorat noir dont on peut penser qu'il est en partie animé par le sentiment de l'éternelle revanche sur l'esclavage et la non moins éternelle attente d'une justice qui ne peut pas, se ce n'est dans la mémoire collective, lui être rendue. Comment Obama fera face à cette montée très probable de la question raciale et communautaire sur la scène politique américaine ? Comment empêchera-t-il les blancs de se sentir menacés si ces revendications atteignent une forte intensité ? Et les autres minorités ? Comment dira-t-il non, lorsque ce sera nécessaire, à ceux qui le voient comme leur messie à la fois rédempteur et justicier ?

    Obama arrive à la tête d'une Amérique affaiblie, désindustrialisée, délégitimée, isolée, surendettée, paupérisée même en certains endroits. Aura-t-il les moyens du changement ? Si oui, saura-t-il le mener pour tous sans trop toucher à un modèle sociétal approuvé massivement par la nation américaine ? Saura-t-il le mener pour tous sans spolier des communautés au profit des autres ? Si non, sera-t-il surmonter l'inévitable déception que cela entraînera ? Saura-t-il montrer à ses partenaires à l'international que sa volonté de diplomatie n'est pas une faiblesse dont ils peuvent espérer profiter (je pense à l'Iran surtout, mais aussi à la Russie), sans retomber dans les travers de l'usage de la force ?

    L'Amérique (et le Monde derrière elle) est passée de désillusions en désillusions depuis presque 20 ans. La fin de <st1:PersonName ProductID="la Guerre Froide" w:st="on">la Guerre Froide</st1:PersonName> n'a pas pacifié le Monde. Internet n'a pas créé le Village Global, la croissance économique n'a pas profité à tous et n'a pas sauvé nos sociétés de leurs problèmes de fond, Elle n'a pas non plus été infinie, la guerre d'Irak n'a pas garanti la sécurité des USA ni démocratisé le Moyen Orient, le modèle Américain n'a pas dans les grandes largeurs triomphé. Alors Barack Obama est-il réellement l'homme de la situation, où n'est-il, par le symbole qu'il incarne et le jeu habile de sa communication, que le dépositaire d'un énième espoir de sauver le Monde, espoir qui sera, sans aucun doute, déçu à son tour, une nouvelle incarnation de ces lendemains qui chantent que le peuple américain, avec cette touche de puérilité qui lui est propre, attend avec impatience ? Après la bulle financière, le risque de bulle Obama, en quelque sorte.

    La route est longue et votre bagage bien lourd de tous ces espoirs, Monsieur le Président. Je vous souhaite beaucoup de courage et bonne chance.


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  • Reprenons le fil des événements.

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>

    Une province à forte identité ethnique fait sécession de l'état souverain dont elle fait partie.

    Constitution d'un gouvernement provisoire en exil, non reconnu par la communauté internationale.

    Création d'une milice d'autodéfense de la population en question.

    Mobilisation de l'opinion publique en faveur de la cause de la province en question.

    Intervention militaire de la puissance souveraine.

    Mise en scène des réfugiés inévitables dans ce genre de situation.

    Propagande autour d'un génocide supposé.

    Intervention militaire lourde d'une puissance alliée de la population ainsi menacée.

    Déclaration d'indépendance reconnue par une partie de la communauté internationale.

    <o:p> </o:p>

    Cet enchaînement d'événement est un résumé de ce qui s'est passé...au Kossovo.

    <o:p> </o:p>

    En Ossétie du Sud (et en Abkhazie dans la foulée), c'est exactement le scénario qu'ont suivi les russes.

    <o:p> </o:p>

    Difficile dès lors de leur reprocher sans mauvaise foi, non ?

    <o:p> </o:p>

    Pour sortir de cette difficulté, restent les idées simples.

    <o:p> </o:p>

    Otan, gentils

    Russes, méchants.


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  • Recette de cuisine russe pour faire ce que vous voulez sur la scène internationale, quand tout le monde oublie que vous êtes une grande puissance, un tantinet nationaliste et que vous voulez vraiment gagner. La cuisson est lente mais le résultat est garanti.

    Attendez d'avoir des interlocuteurs mous et indécis (l'Europe) ou occupés ailleurs (les USA).

    Prenez une population et un territoire dont l'identité culturelle est fortement marquée : en l'occurrence les Ossètes, seuls descendants linguistiques des Sarmato-alains de l'antiquité, et curieusement divisés en deux par les traités internationaux, ceux du nord appartenant à la Fédération de Russie, ceux du Sud à la Géorgie.

    Avec force subventions et facilités, montrez combien ceux du Nord vivent mieux que ceux du Sud, et suggérez une réunification.

    Soutenez les velléités d'indépendance de ceux du Sud (tout en réprimant celles de ceux du Nord le cas échéant, mais discrètement). Montrez en toute occasion que la Russie est l'ami sincère des populations caucasiennes (en omettant de citer les Tchétchènes et la xénophobie parfois meurtrière soutenue par Moscou dans la Russie elle-même envers ces mêmes populations).

    Donnez aux populations concernées un passeport russe, pour leur faciliter les échanges à travers la frontière avec leurs frères du Nord, et donnez des gages d'amitiés.

    Déployez des troupes sur le territoire, en violation des traités internationaux, officiellement pour éviter un bain de sang.

    Prétendez que ces populations, puisqu'elles ont des passeports russes, sont composées de citoyens russes envers lesquels vous avez des droits et des devoirs.

    Créez des provocations avec les géorgiens, pour que la menace de ce bain de sang soit réelle.

    Attendez que ceux-ci commettent une erreur, ce qui est inévitable compte tenu du fait que les options se restreignent pour le gouvernement de Tbilissi, par ailleurs peu désireux de passer pour faible et un poil impatient.

    Vous obtenez ainsi le soutien de votre population heureuse de voir que la Russie a cessé de se dissoudre et au contraire reconquiert ses marches, et vous obtenez un moyen de pression très fort sur Tbilissi qui a l'outrecuidance de ne pas vouloir que Moscou puisse contrôler ce qui se passe dans l'oléoduc BTC, principale voie terrestre non russe d'approvisionnement de l'Europe occidentale. Vous pouvez même vous payer le luxe de détruire les installations en question, histoire de montrer que décidément, l'hiver pourrait être très froid sans votre condescendance à vendre du gaz et du pétrole à vos voisins. En plus vous obligez les Azéris à transiter par vous pour exporter leur pétrole.

    Dites oui à toute proposition d'accord, tout en ne faisant rien, gagnez du temps. L'hiver approche et avec lui la dépendance des européens et de la communauté internationale envers le bon vouloir des fournisseurs russes d'énergie ira croissante.

    Comptez surtout sur la communauté internationale et l'Europe en particulier pour se tirer une balle dans le pied : en laissant l'Europe reconnaître majoritairement l'indépendance du Kossovo que vous avez abandonné (très officieusement, parce qu'officiellement vous n'étiez pas d'accord, solidarité Slave orthodoxe oblige), vous laissez se créer un précédent dans le droit international : une revendication d'indépendance sur une base ethnique. Vous pouvez dès lors tout à fait invoquer ce précédent comme une règle légitime applicable à l'Ossétie du Sud.

    En fait l'Europe s'est tiré une balle dans chaque pied. En repoussant aux calendes grecques les avancées sur l'intégration de la Turquie dans l'Union, elle s'est privée de toute voie alternative durable dans ses approvisionnements terrestres en hydrocarbures, pour un temps encore indéterminé. Et elle pousse les Turcs à penser que finalement, s'entendre avec les russes dans le secteur de l'énergie a au moins le mérite d'avoir des résultats immédiats.

    Ne vous effrayez pas des invocations du droit international (intégrité des frontières et autres tralalas) : bien sûr vous êtes d'accord, mais le problème ne se pose pas puisque vous êtes chez vous (oui, à cause des passeports...).

    Ne craignez pas non plus les promesses d'intégration de la Géorgie à l'OTAN (et son corolaire : l'obligation des membres de l'alliance de défendre l'un de ses membres contre une agression) : un, ce n'est pas vous l'agresseur puisque vous êtes chez vous et que vous n'avez fait que riposter. Deux, l'OTAN ne voulant certainement pas déclencher un conflit ouvert avec la Russie, elle finira par reconnaître que, effectivement, vous êtes chez vous, tout en fronçant les sourcils et en vous menaçant si vous faites encore un pas en avant.

    Ne vous offusquez pas non plus qu'on vous refuse le droit d'aller faire joujou avec les flottes de l'OTAN comme s'était prévu. Ce n'est pas très grave au fond.

    Ne vous inquiétez pas non plus de vous voir refuser l'entrée à l'OMC. Et d'une, l'organisation est en panne, et de deux, vous vendez principalement de l'énergie qui reste en dehors des accords.

    Laissez pourrir la situation : dans le meilleur des cas, la présence de vos troupes définira la frontière future, dans le moins bon, un retrait de votre part finira par passer pour une volonté d'apaisement et nourrira le sentiment que vous êtes peut-être un pays fréquentable.

    Bon, il y a un inconvénient. Comme dit Lino Ventura à Belmondo dans 100 000 dollars au Soleil, le problème quand on prend une carabine pour faire valoir son point de vue, c'est qu'ensuite on ne peut plus <?xml:namespace prefix = st1 ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:smarttags" /><st1:PersonName w:st="on" ProductID="la lâcher. Mais">la lâcher. Mais</st1:PersonName> ce n'était pas dans vos intentions de toute façon. Alors...

    Les russes ne sont décidément pas de bons joueurs échecs pour rien.


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  • De qui se moque Monsieur Sarkozy, particulièrement au sujet de l'Europe ?

    Au sujet du rejet par les  irlandais du mini traité constitutionnel : les peuples ne sont pas à même de décider ce qui est bien pour eux quand il s'agit des intérêts supérieurs de l'Union Européenne. Merci de bien vouloir invalider le référendum et de ratifier le traité.

    Par contre, lorsqu'il s'agit de l'entrée de la Turquie dans l'Europe, alors là il est primordial que ces mêmes peuples qui ne sont pas aptes à choisir leur destin donnent leur avis par référendum : c'est désormais inscrit dans la Constitution ! Bien entendu, on leur fait confiance pour choisir le jour venu en toute connaissance de cause, sans subir de préjugés, d'émotions ni de désinformation. Ben voyons...

    Liez ceci à l'habitude du Président et des ministres actuels à manier sans précautions l'expression « les français veulent que... », Sondages officieux à l'appui, et vous comprendrez que dans la grande démocratie qui est la nôtre, vous avez tout à fait le droit d'avoir la même opinion que nos dirigeants, puisqu'en fait ce sont eux qui prétendent avoir les mêmes idées que vous. CQFD. C'est beau un tel consensus.

    Bon alors, qui dirige ce pays, en définitive ? Le peuple ou les populistes ? Il y a du conducator dans cet homme là, qui sait visiblement mieux que tout le monde où il doit nous emmener. Et encore, ce serait un progrès s'il nous disait clairement où.


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  • 10 soldats français tués en Afghanistan, c'est triste, surtout pour eux et leur famille. Mais est-ce une raison pour avoir droit au déchaînement de bons sentiments et de désinformation dont nous sommes victimes depuis deux jours ?

    L'Afghanistan est en guerre et, à tort ou à raison, nous y participons. Et dans une guerre, il ya des morts. Et en Afghanistan, ce sont plus souvent qu'à leur tour des civils.

    Le plus énervant est le discours qu'on nous sert disant : « ils sont morts dans la lutte contre le terrorisme ». C'est radicalement faux et exclusivement destiné à légitimer la présence des troupes de l'OTAN là-bas. Les Talibans recourent certes aux attentats comme forme de combat (le terrorisme, ne l'oublions pas, est une technique de guérilla, pas la déviance pathologique d'une bande de tarés, et est et fut largement utilisé par tous les mouvements dits de résistance partout dans le monde), mais les talibans n'ont jamais à ma connaissance mené d'opération de terrorisme en dehors de leur zone d'influence (en gros : le nord-ouest du Pakistan, le nord-est de l'Iran et le sud de l'Afghanistan) :rien à voir avec Al Qaida, même s'ils ont sûrement eu le tort d'offrir l'asile à certains de ses combattants. C'est une guerre pour le contrôle d'un territoire et de ses ressources et populations, pas un conflit de civilisation. En fait je lis là une préargumentation en faveur d'un maintien de notre action là-bas.

    Les troupes de l'OTAN sont en Afghanistan pour trois raisons principales :

                La nécessité pour les USA de réagir aux attentats de 11 septembre, essentiellement à usage de leur opinion publique, bien que le choix de l'Afghanistan se justifie par son rôle de camp d'entraînement et de refuge de certains combattants djihadistes.

                Le rejet de l'obscurantisme représenté par les Talibans, qui constituerait pour les populations afghanes un retour en arrière. C'est exact, mais il faut noter à ce sujet que les populations afghanes ne sont pas toutes très « modernes » dans leur conception de l'Islam et de la société non plus. La propagande occidentale a lié la lutte contre les talibans au symbole de la burka, signe de l'aliénation des femmes dans leur conception de la société. Les talibans l'ont certes voulue obligatoire, mais une bonne partie des femmes afghanes dans les zones non talibanes la portent encore aujourd'hui, et n'ont pas accès de par la pression de leurs clans familiaux à l'éducation et aux soins que se proposaient de défendre les occidentaux dans cette affaire.

                L'ouverture de la route pétrolière entre les gisements d'Asie Centrale et le terminal pétrolier (en projet) de Gwadar au Pakistan, qui présente des intérêts stratégiques évidents tant pour les américains que pour les européens : gagner en indépendance par rapport aux pays du Golfe, priver les chinois et les russes du monopole d'exploitation de ces gisements, isoler un peu plus l'Iran, et surtout ne plus avoir à entrer dans le golfe persique pour charger les pétroliers. Le projet d'oléoduc est fixé depuis longtemps, et le président afghan est connu pour ses intérêts personnels dans l'activité des compagnies pétrolières américaines.

    Alors arrêtez de nous bassiner avec les croisades vertueuses de la lutte mondiale contre le terrorisme, qui justifie l'oppression de la Tchétchénie, du Tibet, du Sinkiang, entre autre. Nous sommes là-bas non pour la seule morale, mais pour des raisons géopolitiques.

    Pendant ce temps, en Ouganda, 2,5 millions de personnes meurent dans des camps de réfugiés qui mériteraient plus le nom de camps de concentration, gardés par des soldats recrutés apparemment pour leur séropositivité, et tout le monde s'en fout. Mais il est vrai que l'Ouganda est un fief de mission des églises protestantes évangéliques américaines, et pas un sale pays islamiste pro-chinois...

    Deux derniers mots : dans l'histoire guerrière hélas longue de ce pays, tous les envahisseurs (même les bien-intentionnés) ont fait une fixation sur Kaboul. Or Kaboul est une cuvette dans laquelle toutes ses forces se sont, immanquablement, trouvées prises au piège : le pot de miel attirant l'ours dans la trappe. La fixation que semble faire la presse sur la possession de Kaboul montre que les leçons n'ont pas été tirées. Ah ! La nostalgie de Dien Bien Phû...

    Par ailleurs, certains journalistes insistent aujourd'hui sur l'internationalisation du conflit afghan, soulignant que de nombreux combattants talibans ne sont pas des pachtounes. Réveillez-vous messieurs les journalistes : il y a trois ans déjà, les militaires sur place notaient que les talibans envoyaient au front des Sri Lankais, Indiens, Philippins et autres, leurrés par les recruteurs, en interprétant cela comme la nécessité pour les responsables talibans de compenser les énormes pertes humaines de 2002. Là encore, on crée de toute pièce l'idée d'un empirement de la situation qui est hors de propos. Elle a toujours été grave.

    Voilà, ce que vous voyez ces jours-ci dans les journaux est le mélange traditionnel d'horreur, de bons sentiments, et de menaces voilées qui feront qu'on ne changera rien à rien, mais que le peuple se sentira solidaire autour de ses troupes et de son président...


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